La Commission de Concertation d’Ixelles du 7 octobre 2020 a rendu un avis défavorable sur la demande de permis d’urbanisme pour installer un complexe de cuisines industrielles collectives rue Gray n°137.

Dénommé « Cooklane », le projet s’étend sur environ 1.500 m² et prévoit de transformer un ancien garage automobile en un grand ensemble de cuisines industrielles destinées à la restauration « à emporter ». Les plats sont livrés à domicile en scooters ou vélos (livraisons de type Uber Eat, Deliveroo, etc.).

Le projet a été vivement contesté par les riverains : 80 réclamations dont 1 pétition comportant 30 signatures et une pétition en ligne qui comptait plus de 500 signatures le jour de la Commission de concertation.

La Commission de concertation a rendu un avis défavorable à l’unanimité de ses membres, soit la Commune d’Ixelles, Urban (administration de l’urbanisme de la Région), Bruxelles Environnement et la Direction Patrimoine Culturel.

Cet avis défavorable est motivé par les nuisances sonores et de mobilité engendrées, ainsi que par l’augmentation de densité bâtie en intérieur d’îlot. Selon Yves Rouyet, Echevin de l’Urbanisme et de la Mobilité: « le projet est peu compatible avec un environnement dense, sa situation n’est pas optimale d’un point de vue mobilité et le programme est trop lourd pour s’insérer harmonieusement dans le bâti existant. »

Par ailleurs, la Commune d’Ixelles par la voix de son Echevine du Développement économique et de l’Environnement Audrey Lhoest, ne souhaite pas soutenir ce type d’activités, clairement concurentielles à la restauration classique.

Extraits de l’avis de la Commission de Concertation

A propos de la densité bâtie

  • La Commission précise qu’en zone mixte, l’augmentation des superficies de plancher des activités productives peut être autorisée jusqu’à 1.500 m² par immeuble pour autant que le projet puisse être motivé par des raisons sociales ou économiques et que les conditions locales permettent cette augmentation sans porter atteinte à la fonction principale de la zone (NDLR : le logement) ;
  • le programme engendre une augmentation des surfaces construites, une augmentation des flux, une augmentation des nuisances sonores et olfactives et un fort impact visuel en intérieur d’îlot ;
  • ainsi les conditions locales sont insuffisantes pour porter un tel programme ;
  • la construction porte atteinte à l’intérieur d’îlot, endommage des qualités habitables des logements donnant vers cet intérieur d’îlot et en particulier l’appartement situé au rez-de-chaussée dans le bâtiment à front de rue ;
  • elle densifie d’avantage l’intérieur d’îlot déjà fort chargé ce qui contrevient à l’article 0.6 du PRAS qui stipule que dans toutes les zones, les actes et travaux doivent améliorer, en priorité, les qualités végétales, ensuite, minérales, esthétiques et paysagères des intérieurs d’îlots et y favorisent le maintien ou la création des surfaces de pleine terre ;

A propos des augmentations de volume

  • L’implantation des installations techniques dérogent aux articles 4 et 6 (gabarits) et en particulier à l’article 6§3 du RRU titre I, (éléments techniques en toiture) en ce que ils ne sont pas intégrés dans la toiture et ils augmentent la hauteur des constructions en intérieur d’îlot au-delà des gabarits autorisables ;
  • en outre, le volume est placé de manière préjudiciable à l’esthétique de la construction créant un fort impact visuel ; le volume couvrant une partie de la toiture existante est largement visible par le voisinage ;
  • le choix de la construction de ce volume technique résulte de l’impossibilité technique de passer des gaines d’importantes dimensions et les groupes de ventilations proches des prises et rejets d’air en extérieur ;
  • le programme est de toute évidence trop lourd pour les bâtiments existants ;

A propos de la mobilité

  • Le projet générera une augmentation de la demande en stationnement automobile, moto et cycliste liés aux déplacements des employés mais aussi pour les livraisons ;
  • l’entrée carrossable reste l’unique accès au site, tant pour les marchandises, que les employés directs, les emplois indirects et les livreurs deux roues ;
  • cette disposition n’est pas optimale du fait que les manœuvres entrent en conflit avec la circulation éventuelle qu’il peut y avoir dans le couloir d’entrée/sorties des employés ;
  • le projet prévoit que le lieu soit livré 3 à 5 fois par jour par des camionnettes de 12/14 m² en marche-avant, que l’encombrement liées à la manœuvre de demi-tour empiète sur la zone de parcage moto et vélo prévue pour les livreurs la rendant inutilisable une partie de la journée ;
  • la zone de manœuvre est étroite et peut occasionner des conflits de places inopinés;
  • pour pallier le manque d’emplacement de parcage destiné aux utilisateurs, les auteurs de projet sont en négociation avec Bepark pour obtenir une vingtaine d’emplacements dans les parkings situés à proximité du site (dans les parkings Flagey et parking parc du Viaduc) ;
  • aucune garantie n’est donnée quant à l’obtention de telles places qui dépendent d’une tierce personne ;
  • il a été estimé que les cuisines produiraient un maximum de 12 commandes par heures;
  • ainsi, 75 % des livraisons se feraient à vélo, le reste se ferait à moto ce qui équivaut, aux heures de pics de production, à environ 60 déplacements à moto par heure et 180 déplacements à vélo par heure ;
  • le trafic lié aux livraisons et aux déplacements des employés généré par le projet renforcera les problèmes de ralentissement et d’encombrement déjà présents au sein du quartier en heures de pointe et une augmentation significative du trafic deux roues notamment en soirée ;

A propos des nuisances acoustiques

  • le projet provoquera d’inévitables nuisances acoustiques liées à l’utilisation des cuisines (hottes, ventilation) mais aussi liées aux flux logistiques et de personnes (livreurs, matières premières, professionnels) ;
  • à l’exception de la prise d’air du groupe de ventilation des locaux sociaux, l’ensemble des installations techniques présente un dépassement des valeurs limites réglementaires ;
  • la toiture construite, située au-dessus du passage est équipée de panneaux antibruit (dont l’efficacité n’est pas vérifiée) et est végétalisée;
  • l’ouverture du préau permettra la propagation inévitable du bruit vers les zones de nuits (souvent côté intérieur d’îlot) ;
  • les craintes des riverains sont justifiées ;

A propos du patrimoine

  • le projet prévoit la démolition d’une partie du bâtiment latéral pour y construire un escalier extérieur, la démolition d’une grande partie du rez-de-chaussée du bâtiment latéral et la démolition d’une partie de la façade du bâtiment latéral existant ;
  • ces travaux éventrent le bâtiment latéral et endommagent les caractéristiques typiques des maisonnettes en intérieur d’îlot ;images extraites de la note de synthèse de la demande de permis d’urbanisme (c) Cooklane