L’équilibre hydraulique et topographique de la vallée du Maelbeek est extrêmement fragile. Avec le changement climatique, les pluies torrentielles et inondations vont se multiplier. « Et pourtant, on continue de construire en fond de vallée, à imperméabiliser les sols, à fragiliser les talus. Si on ne change pas radicalement notre manière de penser et faire la ville, nous courons à la catastrophe« , s’inquiète le conseiller communal Yves Rouyet, géographe urbain par ailleurs. Des villes avant-gardistes comme Bordeaux l’ont bien compris (illustration ci-dessus le projet Brazza). Et si on faisait d’Ixelles un modèle bruxellois innovant de gestion des eaux urbaines ?

La rivière Maelbeek prend sa source dans l’Abbaye de la Cambre. Elle a creusé une profonde vallée qu’on identifie aisément dans le paysage, notamment grâce aux étangs et aux rues en forte pente que les cyclistes ixellois connaissent bien. Le Maelbeek a toujours été une eau vive, hyper réactive aux intempéries, débordant rapidement de son lit.

A gauche : carrefour rue Gray, rue de la Levure et rue Wery, inondations 1978 © EGEB au centre : situation Google 2017 et à droite : Carrefour Abbaye de la Cambre photo © Yves Rouyet.

Un plan communal de gestion des eaux urbaines

Le quartier de la rue Gray et de la place Flagey (un ancien étang transformé en place publique) est une zone inondable. Pendant plus d’un siècle, on a bétonné les rues et les intérieurs d’îlots, ne permettant plus à l’eau de s’infiltrer. Lors des orages, l’eau ruisselle le long des rues très pentues (chée Ixelles, Vleurgat, Malibran, Brasserie, etc.) et provoque des inondations. La réponse apportée par les pouvoirs publics fut, jusqu’à présent, essentiellement infrastructurelle : on a enfui et canalisé le cours d’eau dans un collecteur sous la rue Gray et on a réalisé un vaste bassin d’orage sous la place Flagey (30.000m³ qui répondent aux pluies trentenaires).

« Dans les discours officiels, le Maelbeek a toujours été présenté comme un danger contre lequel il fallait se prémunir. Et pourtant, la rivière fut historiquement notre amie : elle a permis le développement économique d’Ixelles grâce aux viviers aménagés par l’abbaye et aux brasseries qui y puisaient l’eau pure. c’est au bord des étangs que s’est érigé le premier noyau villageois », rappelle Yves Rouyet.

illustration : la carte Ferraris de 1777

Pour Audrey Lhoest, cheffe de groupe Ecolo au conseil communal ​ »la​ tendance à la minéralisation à tous crins​, que l’on peut observer sur tout le territoire régional, et la bétonisation de la chaussée d’Ixelles et (bientôt) de la place Fernand Cocq sont, une fois de plus, l​’​exemple à ne pas suivre!« .

ECOLO propose de réaliser un plan communal de gestion de l’eau urbaine. En développant le principe de la solidarité de versant : réaliser des aménagements en amont, dans des quartiers qui ne sont jamais inondés, pour préserver les quartiers situés en aval. Toitures vertes, citernes de récupération d’eau de pluie, perméabilisation des voiries, plantations d’arbres… Et surtout : arrêter de construire sur les terrains encore en pleine terre, comme les zones de potagers par exemple. Les plus grandes villes du monde ont compris l’urgence. Shanghai, par exemple, a développé le projet de « ville éponge ».

Pour Milena Valachs, candidate d’ouverture du quartier Flagey, « vu sous un angle positif, l’eau de pluie peut constituer un élément ludique du paysage urbain : rigoles, cascades, méandres, fontaines. Ce type d’aménagements serait particulièrement bienvenu dans un quartier qui manque cruellement d’espaces de jeux ».

Dans certains villes, on prévoit dès le départ des espaces publics pouvant exceptionnellement être inondés.

Par ailleurs, les cours d’eau, remis à ciel ouvert et leurs berges végétalisées, les étangs, les mares, les noues et fossés de récupération de l’eau de pluie sont des milieux d’une grande richesse de biodiversité. Dans le sud de la Commune, les espaces ne manquent pas pour réaliser ce type d’aménagement, même le long des trottoirs.

Construire sur pilotis

Lorsque l’on creuse en fond de la vallée du Maelbeek (rue Gray, rue Kerckx…), on perce la nappe phréatique. Le chantier catastrophique du n°50 de la rue Kerckx en est un parfait exemple. Les fondations sont totalement remplies d’eau, malgré le pompage depuis… 2 ans ! Le talus est fragilisé et une dizaine de maisons alentours sont fissurées…

Pour réaliser l’avenue de la Couronne, on a vers 1880 réalisé d’immenses remblais de terres. Toucher à ces remblais constitue un risque énorme pour la stabilité de nombreuses habitations.

ECOLO propose, entre autres, d’étudier un plan d’urbanisme pour la vallée du Maelbeek qui imposerait la construction sur pilotis pour toute nouvelle construction. « Courants aux USA et au Canada, les quartiers d’immeubles sur pilotis commencent à se développer en Europe« , signale Yves Rouyet. Un des plus bel exemple est le quartier Brazza à Bordeaux, dans le lit inondable de la Garonne : 5.000 logements sur pilotis !

Outre qu’elle prémunit la maison des inondations, la technique des pilotis est écologique puisqu’elle permet de limiter l’utilisation du béton et que l’impact sur le sol est limité à quelques pieux.